L’un des principes de vie d’un assassin est de ne pas ressentir de sentiments, de ne rien posséder qui puisse être détruit afin de nous atteindre. Les marcheurs noirs sont pour la plupart des solitaires ne vivant que pour servir la sombre parole de la reine de l’ombre, Armangarde et rien d’autre ne les intéresse, ils sont dépourvus de toute émotion, de tout sentiment, ou du moins on les a obligés à oublier ce que sont ces maux. Cependant, bien que leur entrainement soit rude au point d’ancrer chaque principe de vie d’assassin dans le crâne des drows suivant cette voie, ils n’en restent pas moins des êtres doués de conscience et de sensibilité et certains succombent aux maux dont ils voulaient se protéger. Car si ces êtres se refusent tout sentiment ce n’est pas par désillusion ou manque de foi en eux, mais bien pour se protéger et protéger les êtres vers lesquels pourraient se tourner leurs sentiments, un assassin sait très bien comment manipuler les proches de quelqu’un pour le faire souffrir, il prévient donc le fait qu’on lui fasse la même chose.

Je suis le maître des fils de l’ombre, je suis le roi des elfes noirs et pourtant je suis le premier à rompre mon serment de faucheur sombre, j’ai succombé à ce que l’on est censé oublier. Même les plus forts peuvent parfois être faible et c’est ce que j’ai été, j’ai laissé mon âme et mon esprit être faible et je me suis lié à une femme, Cythère Exaurie, la reine des Sirènes. Bien évidemment, son statut et sa puissance ne me font pas craindre qu’il lui arrive quelque chose de grave, car elle saurait se débrouiller parfaitement bien, mais ce sont ses agissements envers moi qui me font ressentir ce qu’il est interdit de ressentir en étant à mon rang : la souffrance. Depuis un peu plus de deux ans maintenant, elle m’ignore et m’évite sans raison et tout ceci m’atteint au plus profond de moi et je ne puis faire taire ce mal qui me serre le cœur.

C’est donc pour cela que j’ai décidé de quitter les intrigues de Ravenclaw pour un certain temps afin de me rendre sur les terres de la bien-aimée. Je savais où la chercher à cette période, depuis des années elle avait pris l’habitude de se rendre au village fleuri de Njordaëlondé c’est donc là-bas que je la rejoignais sans qu’elle ne soit au courant de rien. Je me dissimulais aux habitants en attendant d’avoir eu ce que je voulais. Et ça ne tarda pas à venir, peu de temps après mon arrivée Cythère apparaissait auprès de son peuple. Elle était toujours aussi ravissante et cela me fit sourire de la voir ainsi, mais ce qui la suivait me fit perdre ce sourire. Elle était avec sa sœur et une petite fille qui se tenait à elle, j’observais cette enfant, ce n’était pas une sirène, elle n’en avait pas l’allure d’une sirène. Je la regardais donc plus attentivement et je retrouvais mon sourire, elle avait la peau mauve et les oreilles légèrement pointues typiques des jeunes drows, cela voudrait-il dire que c’était ma fille ? Serait-ce pour ça que Cythère m’avait évité pendant tout ce temps ?

Je les observais toujours en me plaçant au-dessus un arbre, je regardais la petite qui jouait dans le champ, encore une fois je bravais les interdits de ma situation, mais comment être insensible à cela, elle était si jolie, elle ressemblait à sa mère, mais avec des attributs d’elfe noir. Je le perdis de vue, mais je l’entendis crier et pleurer, mais le temps que j’intervienne, sa mère était déjà arriver, je restais donc sur mon perchoir en restant parfaitement immobile, elles venaient s’assoir sous l’arbre où je me trouvais. Je les regardais tendrement toutes les deux, elles étaient si jolies, mais je ne savais que faire pour leur montrer que j’étais là. Je soupirais et je décidais de faire ça tout simplement , je restais donc sur mon arbre en regardant en bas pour leur parler :

« Bonjour, mes chéries. »

Il nous arrive de cacher des choses, de ne pas dire ce que nous pensons trop dure à accepter ou pour garder certains secrets pour nous. Cependant certains secrets sont tels qu’il ne faut pas qu’ils soient dévoilés, c’est le cas pour les techniques secrètes des marcheurs noirs ou pour assassinats commandités. Les arcanes suprêmes des dieux créateurs sont aussi d’importants secrets qu’il vaut mieux ne pas connaitre. Mais pourquoi un enfant serait-il un secret aussi grand ? Pourquoi vouloir cacher son enfant à l’autre parent lorsque tout va bien ? Est-ce de peur de le perdre ? Est-ce de peur d’être rejeté ?

Je me posais trop de questions et en ce moment, je me fichais bien des réponses, je me contentais d’admirer la femme que j’aimais plus que tout en ce monde et la petite fille qui n’était rien d’autre que mon enfant. Peut-être aurais-je dû être en colère, mais il n’en était rien, j’étais heureux d’avoir engendré une si jolie petite fille. Je les regardais encore un instant depuis mon perchoir avant de me laisser tomber devant elle.

Je ne savais pas quoi faire, je me laissais donc guider par mon instinct. Je posais mon regard sur la petite fille, je la regardais tendrement, les yeux emplis d’étoiles et je souriais de bonheur en posant ma main sur sa joue pour la caresser doucement. Elle était aussi douce que sa mère et je lui déposais un gentil bisou sur le front en lui souriant.

Je reportais mon attention sur Cythère en la regardant de la même manière, mais j’allais l’embrasser passionnément sur les lèvres sans qu’elle puisse m’en empêcher. Cela faisait si longtemps, elle me manquait tant que je me fichais bien que l’on nous voit nous embrasser. Elle était toujours aussi jolie, elle était restée la même, celle qui avait fait tomber le plus parfait des guerriers de l’ombre sous son charme. Quittant à contrecœur ses lèvres, je lui souris amoureusement, en lui répondant :

« Je viens retrouver, la femme que j’aime. Et rencontrer notre si bel enfant.

J’avais une profonde envie de les prendre dans mes bras et de les câliner, je voulais les avoir pour moi et ne plus les quitter.